Belgrade : un air frais de mobilisation
Tous les quinze jours, au cri de « Et la ville, elle est à qui ? Elle est à nous », le nombre de participant.e.s aux rassemblements contre le mégaprojet Belgrade Waterfront n’a cessé de croître, jusqu’à dépasser les 20 000. Comme dans beaucoup d’autres grandes villes du monde, les habitant.e.s de la capitale serbe protestent contre la corruption des élites et l’accaparement du centre-ville par quelques grandes fortunes du BTP transnational.
Belgrade, ville aux vastes terrasses et à la vie si souvent alanguie, sait aussi montrer son visage aiguisé et indomptable. C’est plutôt cette face-ci que craignent les peuples des Balkans, habitués à chasser infortunes d’un sourire, avec quelques amis et des verres de rakija. Le fait est que l’attroupement des foules dans la rue ne présage ici généralement rien de bon : désordres urbains, hooligans, poètes hystériques ou politiciens tempétueux.
Lorsqu’en 2014, Aleksandar Vučić, actuel premier ministre serbe, a voulu mettre un coup d’accélérateur au projet « Les Eaux de Belgrade », la ville a réagi avec scepticisme, un sourcil froncé. Un projet conclu entre le gouvernement et les Émirats arabes unis, financé à hauteur de 3 000 millions d’euros, avec la prétention d’urbaniser les bordures de la Save comme une mégapole du Golfe persique : centres commerciaux, appartements de luxe, parcs et jardins, et un gratte-ciel de 168 mètres... Au total, presque deux millions de mètres carrés qui devraient être réaménagés par le promoteur émirati Eagle Hills, dans une capitale où le salaire moyen ne dépasse pas les 400 euros.
Le mouvement « Ne da(vi)mo Beograd », jeu de mots entre « Ne donnons pas Belgrade » et « Ne noyons pas Belgrade », s’est peu à peu constitué, malgré l’inégalité du rapport de forces. Depuis deux ans, un petit collectif, principalement composé de jeunes de la ville, et d’une petite partie de l’élite intellectuelle de sociologues, architectes et politiciens en marge, ont dénoncé l’opacité de l’initiative, les arrangements avec la loi, l’idéologie classiste, et l’absence de consultation de la société civile dans la planification du projet.
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