Quand les migrants deviennent des fugitifs
Menacés d’expulsion par la procédure Dublin, certains doivent échapper à la police et survivre pendant dix-huit mois dans le dénuement le plus total avant de pouvoir déposer une nouvelle demande d'asile.
Le 7 janvier dernier, Omid, un demandeur d’asile de 29 ans, avait rendez-vous à la préfecture de police, à Châtelet dans le 4e arrondissement de Paris. Sur place, la police l'arrête. Direction le centre de rétention administrative de Vincennes où il passe la nuit. Il ne voit pas d’avocat et les fonctionnaires ne lui laissent pas l’occasion de déposer un recours devant le juge des libertés et de la détention. Dès le lendemain, il est mis dans un avion pour la Belgique. Ce type d’expulsion, qui prend la justice de court, n’est pas une première. L’homme tombait sous le coup de la procédure Dublin, qui désigne le premier pays où les empreintes d’un réfugié ont été recueillies comme responsable de sa demande d’asile. Les autorités belges ne prennent pas en charge Omid qui revient à Paris deux jours plus tard. « Actuellement, je vis illégalement en France et je n’ai aucune idée de comment je vais survivre. Je ne l’ai pas vraiment décidé, mais je suis en fuite », résume-t-il dans un très bon anglais.
Lorsqu’ils tombent sous le coup de la procédure Dublin, les réfugiés n’ont que deux possibilités. Se soumettre au contrôle des autorités en espérant faire partie des personnes qui échapperont à l’éloignement pour passer en procédure normale ou bien se mettre en fuite. Celle-ci ne relève pas toujours d’un choix de leur part. Dès le 19 juillet 2016, par l’intermédiaire d’une circulaire, Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur, avait vivement encouragé les fonctionnaires à placer en fuite les demandeurs d’asile récalcitrants. « En tout état de cause, vous recherchez à caractériser la fuite dès lors que l’étranger placé sous procédure Dublin ne coopère pas avec vos services en vue de l’exécution du transfert », écrivait le garde des Sceaux. Dans une circulaire du 20 novembre 2017, son successeur Gérard Collomb avait ordonné de poursuivre cette politique. Lorsque les réfugiés sont déclarés en fuite, l’allocation pour demandeur d’asile est suspendue et le délai de transfert passe de six à dix-huit mois.
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